2.4.5.2 Le médecin du travail
Pour renforcer le rôle du médecin du travail, la loi lui confère de nouveaux pouvoirs. Elle consacre son indépendance, élargit son statut protecteur, et autorise le recrutement de médecins non titulaires du diplôme de médecin du travail afin de pallier la pénurie actuelle de médecins du travail.
a. Prévention des risques collectifs
c Propositions à l’employeur
Limité jusqu’à présent à des mesures individuelles, le pouvoir du médecin du travail de faire des propositions à l’employeur est étendu aux mesures collectives.
Selon l’article L. 4624-3 du Code du travail, lorsque le médecin du travail constate la présence d’un risque pour la santé des travailleurs, il propose à l’employeur des mesures visant à la préserver. Ces propositions sont faites par un écrit motivé et circonstancié.
Selon l’article L. 4624-3, lorsque l’employeur le saisit d’une question relevant de ses missions, le médecin doit également faire ses préconisations par écrit.
c Obligations de l’employeur
L’employeur doit prendre en considération ces propositions et, s’il refuse de les mettre en œuvre, faire connaître par écrit les motifs qui s’opposent à ce qu’il y soit donné suite (art. L. 4624-3 C. trav.).
À noter : contrairement à ce qui est prévu pour les mesures individuelles (recours de l’employeur ou du salarié concerné devant l’inspecteur du travail qui tranche, après avis du médecin inspecteur du travail), la loi ne prévoit pas d’arbitrage en cas de refus de l’employeur de suivre les préconisations du médecin du travail. Le texte ne prévoit pas non plus de sanctions, le Parlement ayant en effet considéré que les sanctions en cas de non-respect de l’obligation de sécurité de résultat suffisaient.
c Informations du CHSCT et de l’inspection du travail
Jusqu’à présent, l’employeur devait tenir les propositions du médecin du travail ainsi que ses éventuelles réponses à la disposition d’un certain nombre d’institutions ou de personnes : CHSCT (ou, à défaut, délégués du personnel), inspecteur du travail, médecin inspecteur du travail, etc. Depuis la loi « Rebsamen » du 17 août 2015, il ne suffit plus de « tenir » ces éléments à disposition : il faut les « transmettre » (art. L. 4624-3 C. trav.).
b. Statut
c Indépendance
Selon l’article L. 4623-8 du Code du travail, le médecin du travail assure ses missions « dans les conditions d’indépendance professionnelle définies et garanties par la loi ». Le législateur consacre ainsi l’indépendance du médecin du travail par rapport à l’employeur.
c Protection
Pour garantir l’indépendance du médecin du travail, la loi nouvelle élargit le statut protecteur dont il bénéficie. C’est ainsi qu’à l’instar de la protection accordée aux représentants au personnel, les garanties prévues en cas de licenciement d’un médecin du travail (nécessité d’une autorisation de l’inspecteur du travail dont dépend le SST, après avis du médecin inspecteur du travail) sont désormais applicables :
– à la rupture conventionnelle ;
– à la rupture anticipée du Contrat à durée déterminée (CDD) pour faute grave ou inaptitude médicale, ou à l’arrivée du terme quand l’employeur n’envisage pas de renouveler le contrat malgré une clause de renouvellement (art. L. 4623-5-1 C. trav.) ;
– à l’arrivée du terme du CDD (art. L. 4623-5-2 C. trav.). L’employeur doit saisir l’inspecteur du travail 1 mois avant l’arrivée du terme et celuici statuer avant la date du terme ;
– au transfert du médecin compris dans le transfert partiel du service de santé (art. L. 4623-5-3 C. trav.). Dans les deux derniers cas, l’inspecteur du travail doit vérifier si la mesure n’est pas en lien avec l’exercice des missions de médecin du travail et n’a pas un caractère discriminatoire. Ces garanties ne s’appliquent pas aux autres membres de l’équipe pluridisciplinaire du SST.
c Dérogation à la détention du diplôme
L’article L. 4623-1 du Code du travail qui prévoit qu’un diplôme spécial est obligatoire pour l’exercice des fonctions de médecin du travail est complété pour permettre à titre dérogatoire à tout service de santé au travail (interentreprises ou autonome) de recruter à titre temporaire un interne de la spécialité, après délivrance d’une licence de remplacement et autorisation des conseils départementaux compétents de l’ordre des médecins. Le texte précise que cet interne exercera sous l’autorité d’un médecin du travail expérimenté du SST et un décret doit fixer les conditions de ce recrutement. Pour pallier la pénurie de médecins du travail, un médecin peut désormais être recruté pour exercer la médecine du travail s’il est simplement « qualifié en médecine du travail ». Les conditions de certificat d’études spéciales de médecine du travail et de diplôme d’études spécialisées de médecine du travail disparaissent. Le médecin doit communiquer ses titres à l’inspection médicale du travail, dans le mois suivant son entrée en fonction dans un SST. Des aménagements sont apportés aux modalités de nomination et de changement d’affectation du médecin du travail. Dans les SST interentreprises, en cas d’emploi de plusieurs médecins du travail, le secteur déterminé pour chacun d’eux n’est plus défini en fonction d’un effectif de salariés suivis. S’agissant des missions du médecin du travail, et en particulier la mission de conseil en matière d’adaptation des postes, des techniques et des rythmes de travail à la santé physique et mentale, le décret précise que l’objectif de cette mission est notamment de préserver le maintien dans l’emploi des salariés. Par ailleurs, le conseil en matière de protection des travailleurs contre les agents chimiques dangereux est élargie à l’exposition à ces agents (et pas seulement leur utilisation). Pour l’exercice de ses missions, le médecin du travail peut désormais confier certaines activités sous sa responsabilité, dans le cadre de protocoles écrits, aux infirmiers, assistants de SST ou aux membres de l’équipe pluridisciplinaire, dans la limite de leurs compétences. En outre, le décret prévoit les modalités de son remplacement en cas d’absence : de droit si l’absence est de plus de 3 mois ; facultatif si elle est de moins de 3 mois, ce remplacement pouvant alors être assuré par un médecin du travail, un collaborateur médecin ou un interne en médecine du travail, sous condition. La procédure prévue en cas de licenciement du médecin du travail (art. R. 4623-20 et suivants : entretien préalable, consultation des instances compétentes, demande d’autorisation à l’inspection du travail, enquête contradictoire), est par ailleurs rendue applicable en cas de rupture anticipée ou non-renouvellement du CDD et en cas de rupture conventionnelle.
Le personnel infirmier
L’infirmier recruté par un SST doit être diplômé d’État ou avoir l’autorisation d’exercer sans limitation dans les conditions prévues par le Code de la santé publique. S’il n’a pas suivi une formation diplômante en santé au travail, l’employeur doit l’y inscrire au cours des 12 mois suivant son recrutement. L’infirmier exerce désormais ses missions propres ainsi que celles définies par le médecin du travail, sur la base de protocoles écrits. Un entretien infirmier peut être mis en place dans le cadre de ces protocoles. Il donne lieu à la délivrance d’une attestation de suivi infirmier, qui ne comporte aucune mention relative à l’aptitude ou l’inaptitude médicale du salarié. L’infirmier peut en outre, toujours dans ce cadre, effectuer des examens complémentaires et participer à des actions d’information collectives conçues en collaboration avec le médecin du travail et validées par lui.
L’assistant de SST
Dans les SST interentreprises, l’assistant de SST apporte une assistance administrative au médecin du travail et aux autres membres de l’équipe disciplinaire quand elle existe. Il contribue également à repérer les dangers et à identifier les besoins en santé au travail, notamment dans les entreprises de moins de 20 salariés. Il participe à l’organisation, à l’administration des projets de prévention et à la promotion de la santé au travail et des actions du service dans ces mêmes entreprises.
L’interne en médecine du travail
Les SST peuvent être agréés comme organismes extrahospitaliers accueillant en stage les internes inscrits au diplôme d’études spécialisées de médecine du travail ou les étudiants inscrits en deuxième cycle des études médicales. L’interne peut être autorisé à exercer la médecine du travail en remplacement d’un médecin du travail temporairement absent ou encore, dans l’attente de la prise de fonction d’un médecin du travail.
L’intervenant en prévention des risques professionnels
Le SST peut faire appel à un Intervenant en prévention des risques professionnels (IPRP) s’il n’a pas les compétences techniques nécessaires à son intervention. L’IPRP assure des missions de diagnostic, de conseil, d’accompagnement et d’appui. Il dispose du temps nécessaire et des moyens requis pour exercer ses missions. Par ailleurs, il a accès à tous les documents non nominatifs rendus obligatoires par le décret. Il ne peut subir de discrimination en raison de son activité de prévention et son indépendance doit être garantie. L’employeur doit informer le SST de l’intervention de l’IPRP et des résultats des études menées dans ce cadre. Le décret décrit également les modalités d’enregistrement de l’IPRP, condition d’exercice de son activité.
Éditeur du transport et de la logistique.
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